Histoire de Le Mesnil-Opac

Sur les hauteurs du canton, formé de vallons et de plaines, Le Mesnil-Opac doit son nom aux seigneurs qu'elle eut autrefois. La famille "OPAC" (d'origine scandinave ?) du XIème siècle (1027) signent dans une charte donnée à l'Abbaye de Fécamp par Guillaume le Conquérant.

 

Le mot Mesnil que nous retrouvons dans plusieurs communes de la Manche signifie : lieu, manoir ou demeure. Le Mesnil-Opac signifierait "la demeure des OPAC". Ce dernier mot a fait également naître chez des personnes familiarisées avec la langue latine, l'idée d'un endroit couvert de bois, d'épais bocages (mesnilum : lieu et opaca : ombragé). Il ne faut pas oublier que jadis, le territoire du Mesnil-Opac et des communes avoisinantes était en quelque sorte une forêt.

 

L'orthographe de la paroisse se modifie au cours des siècles. En 1432 : le Mesnil-Opac ; en 1460 : Mesnil O Parc ; en 1617 : le Mesnil-au-Pas ; en 1675 à 1680 : le Mesnil-au-Parc ; en 1703 : le Mesnil-au-Par ; en 1776 : le Mesnil-Oparc, en 1780 : le Mesnil-Opacq ; en 1819 : le Mesnil-Opac (orthographe actuelle).

 

Historique :

Le nom du Mesnil-Opac doit son nom aux seigneurs qu'elle eut autrefois puisque dans une charte donnée à l'Abbaye de Fécamp par Guillaume leConquérant, on lit : la signature de Bernard fils d'Opac. A cette époque, Le Mesnil-Opac fait partie de la Baronnie de Moyon. En 1198, on trouve dans un acte le nom de Hugues Opac. Sur la paroisse du Mesnil-Opac au mois d'août 1279, Robert de Bricqueville, écuyer, fils de Robert, chevalier, vend au Chapitre de Coutances, trente quartiers de froment, mesure de Tessy, à prendre et à avoir annuellement sur son moulin du dit Tessy, par le prix et somme de 80 livres... En 1563, on trouve Jean de Mathan, en 1598 les Levallois, puis les Pinel et un siècle plus tard, Bénédic de Béton et Jean Lemoussu sieur de la Martinière.

 

 

Au XVIIème siècle, le Mesnil-Opac reçut René Toustain de Billy.

 

Bibliographie G.le Georgeu, Notice bibliographique sur René Toustain de Billy, 1883, et A.Matinée, René Toustain de Billy, historien du Cotentin dans Notices, mémoires et documents publiés par la société d'archéologie de la Manche, t.6, 1882, 2ème partie.

 

René Toustain, sieur de Billy, naît au Bény-Bocage en 1643. Sa famille est d'une bonne noblesse rurale. Par les femmes, il était apparenté aux familles de Baudre, le Chartier (que l'on découvre à Moyon) et du Hamel. Docteur en théologie, il porta ce titre avec beaucoup de modestie. Parlant quelque part d'une assemblée tenue en Hongrie au sujet du schisme des Hussites, il dit, avec ironie : "On y disputa Qu'est-ce qu'auraient fait tant de docteurs ?"

Nommé curé du Mesnil-Opac (qu'il appelle familièrement le Mesnil au Parc) en 1676, il gardera ce poste jusqu'à sa mort en 1709. Il comble l'église de libéralités dont il n'oubliera pas de mentionner le détail dans les resgistres paroissiaux parmi les actes de baptêmes, mariages et sépultures : en 1677, l'année de son installation, il fait bâtir une sachristie à ses frais ; ce sont des ouvriers du Bény qui exécutent la maçonnerie. En 1679, il fait peindre, toujours à ses frais, le retable. En 1680, on fait de neuf le bois de la nef ; la main d'oeuvre est payée en partie par le curé. Cette même année, le clocher qui était au milieu de l'église a été transporté tout entier, et sans qu'il s'en soit détaché une seule ardoise, au bas de la nef, au lieu où il est, par le moyen de leviers.

Aucun autre détail de sa vie n'est connu, si ce n'est l'affirmation tenace que l'amour de la chasse l'aurait mis en conflit avec son évêque, Loménie de Brienne.

Il se fait poète et il est un véritable historien. L'oeuvre historique de Toustain de Billy est remarquable : elle se divise en deux parties : Histoires ecclésiastiques du diocèse de Coutances , publiée en 1874 par François Dolbet, archiviste de la Manche, et Histoire du Cotentin et de ses villes dont les parties relatives à Saint-Lô, Carentan et Mortain ont été publiées au XIXème siècle également. La valeur de cette oeuvre est nettement positive, surtout pour l'époque où il écrit. La preuve en est que le XIXème siècle  a jugé utile de publier un ouvrage connu seulement par de multiples copies.

Nous possédons deux histoires du diocèse de Coutances : celle de Toustain de Billy (fin du XVIIè) et celle du chanoine Lecanu (1789). L'une des deux ne vaut rien, mais ce n'est pas la première en date.

Ci-dessous quelques extraits de A.Matinée portant jugement sur son oeuvre.

 

 

"Le système de composition de Toustain de Billy est de développer l'histoire locale en la rattachant le plus possible à l'histoire générale...c'est assurément la première qui demeure sa spécialité." Pour conserver la mémoire et le souvenir de René Toustain de Billy, le chemin virtuel allant de la grande route au cimetière porte le nom de "rue Toustain de Billy". 

 

 

Le Mesnil-Opac voit naître Léon Havin en 1755. Il est avocat au bailliage de Torigni lorsqu'éclate la Révolution. Membre de l'assemblée d'élection de Saint-Lô et du bureau du bien public, Député de la paroisse du Mesnil-Opac, nous présumons que c'est lui qui inspire le contenu des cahiers de doléances du Mesnil-Opac, de Beaucoudray, de Montabot, du Chefresne, de Moyon, de Tessy, de Fervaches, du Mesnilrault (Mesnil-Raoult) et de Troisgots (sur les cahiers de doléances du Mesnil-Opac sont nommées de personnes privilégiées : le curé Augustin Barbe, le Prince de Monaco, Dame Marie-Anne Le Brey, veuve du Messire Bernard seigneur des fiefs de Bricqueville et du manoir du Mesnil-Raoult, et le sieur Banville). Fervent partisan des idées nouvelles, il est élu député à la Convention. Lors du jugement de Louis XVI (janvier 1793), il vote pour la mort, cependant avec le sursis et l'appel au peuple. En 1798, il est nommé par le Directoire, substitut du commissaire du pouvoir exécutif au tribunal de cassation. Il passe juge à la cour d'appel à Caen. Banni de la France sous la deuxième Restauration, exilé à Portsmouth, il doit quitter rapidement le sol anglais pour partir à Malines en Belgique puis il a l'autorisation de revenir à Caen où il meurt en 1829.

Son fils, Léonor-Joseph Havin (1799/1868) est également un illustre personnage. Député de Saint-Lô en 1831, il fût Conseiller Général et Commissaire du Gouvernement Provisoire dans le département de la Manche en 1848. Maire de Torigni de 1840 à 1852, il devient ensuite le directeur général du journal Le Siècle. Il sera considéré comme un "personnage digne de Molière et de Daumier, un étonnant Tartuffe de la libre-pensée."

Au début du XIXème siècle, seulement les garçons peuvent aller à la maison d'école qui appartient à l'ancien presbytère. L'école ne peut accueillir que huit élèves gratuitement, les autres enfants doivent payer. En 1876 le prêtre Havin fait un don généreux pour accueillir davantage d'enfants à l'école. Une école mixte est construite entre 1888 et 1889, elle abrite également la mairie. En 1944, lors des bombardements, le bâtiment est très endommagé. Avant la reconstruction de l'école, les enfants vont dans une pièce de l'ancien presbytère. Suite à la démolition du presbytère, des remises sont mises à disposition pour servir "d'école" au village de Pivelet, les Champins et dans le bourg. Une première phase de rénovation se déroule en 1949, puis une deuxième phase en 1957 et 1959. Le groupe scolaire sera inauguré le 10 mars 1960 par Jean Daudé. L'école fermera ses portes en 1984. Le bâtiment accueille actuellement la salle des fêtes. 

 

Voici un extrait du journal intime de M.Voisin en 1847 nous décrivant la ferme des Le Vallois (fin XVIII début XIXème siècle) : "En venant des Vaux à la mairie (du Mesnil-Opac), nous avons passé par le Brisoult (actuellement le Brisault), grande et vaste ferme où demeuraient autrefois les M.M Le Vallois...C'était bien tenu alors, il y avait un beau jardin, tout muraillé, de beaux logements pour les seigneurs, un colombier qui est abattu, des meurtrières pour tirer à coup de fusil sur les ennemis..." Les ennemis des Le Vallois étaient probablement  les Révolutionnaires chassant les seigneurs de leurs demeures.

 

Au village "les Champins" se trouvait une notoire distillerie gérée par Emile Deshayes s'occupant également d'une scierie. Un bâtiment de la ferme renfermait plusieurs grosses citernes en verre qui contenaient vraisemblablement de l'eau de vie nommée familièrement "la goutte". Le propriétaire, avec sa carriole, allait chercher les contrôleurs de la régie appelés "les rats de cave" à Tessy.

 

En 1990, la commune comptait 200 habitants, en 1999 224 habitants. La commune comptait en 1999 7 exploitations agricoles. Le bourg du Mesnil-Opac a été réaménagé dans le cadre du Contrat de Pôle Intercommunal. Un grand parc de stationnement paysager ainsi qu'un panneau d'information sont à la disposition du public. 

Sur le centre bourg, le réseau électrique a été mis en souterrain. Le Mesnil-Opac est un lieu très passager où l'on constate la construction de maisons nouvelles.

 

ATOUTS TOURISTIQUES

La région de la Vallée de la Vire conserve un assez grand nombre de manoirs et de fermes d'une grande diversité de matérieux (granit, schiste, poudingue, argile) qui ont gardé beaucoup de caractère, malgré parfois des mutilations anciennes ou restaurations abusives du XIXème siècle.

Le "grand Bricqueville" ou "bricqueville la heurtière" du Mesnil-Opac, est un ancien manoir possédant du caractère (pierre, torchis, brique, chaume). Il fut probablement construit dès le Moyen-Age. Il a appartenu aux Bethon, Bernard de Bricqueville, de Belfonds.

 

L'église primitive était une humble église au cintre surbaissé. Elle se trouvait du côté du couchant vers la commune du Mesnil-Herman, à l'endroit connu sous le nom de la Hédouvière. A cet endroit existe un champ porté à la matrice cadastrale sous le nom du Champs de la Croix. Le mot temple est également employé pour désigner cet ancien édifice. Peut-on supposer que cette église s'est reconvertie en temple au XV-XVIème siècle ? Malheureusement aucun document ne le certifie.

La deuxième église aurait été bâtie par deux moines qui appartenaient à un petit monastère qui aurait existé au-dessous de l'emplacement actuel de l'église. En 1676, l'église ressemble à une petite chapelle. L'abbaye de Saint-Lô nomme Messire Toustain de Billy curé de Mesnil-Opac et il y reste parce que la commune lui procure des loisirs pour ses importants travaux. Il fait à ses frais des rénovations qui embellissent l'église. Tour à tour architecte, surveillant des travaux, il commence à édifier une sachristie, puis à restaurer l'autel, remplacer le bois de la nef qui est en ruines. En 1680, il veut transporter tout d'une pièce au bas de la nef, le clocher qui se trouvait au milieu. A son signal, le clocher se soulève et se met en mouvement et après une marche aérienne de courte durée, il était en place. Combien d'ouvriers, de leviers et d'engins pour cet ouvrage ? Nul ne le sait, seulement pas une ardoise du clocher ne fut détachée. L'église possède une chapelle dit "la chapelle de Sainte-Hermelon certains documents, "depuis Henri II jusqu'à la Révolution, le patronage de l'église de Mesnil-Opac appartint à l'Abbaye de Saint-Lô.

 

Dès la fin du XVIIème siècle, l'église du Mesnil-Opac est célèbre pour ses reliques de Saint-Vincent. Ce trésor est parti de Rome le 30 novembre 1688. Arrivée à Paris le 4 juin 1689, la relique se dirige vers l'Evêché de Coutances qui la reçoit le 27 septembre 1689. Toustain de Billy réceptionne le magnifique reliquaire de Saint Vincent le dernier dimanche de septembre. Les pèlerinages pour Saint Vincent commencent (pèlerinages paroissiaux et pèlerinages individuels). La commune célèbre deux fêtes : le 22 janvier (Saint Vincent) et le dernier dimanche de septembre (à présent la fête communale se déroule le 15 août.

 

Au XVIIIème siècle, un autre prêtre du Mesnil-Opac est très apprécié de la contrée : l'abbé Ursin Barbe. Il rend non seulement de grands services au Mesnil-Opac, mais encore aux autres paroisses limitrophes en qualité de médecin. Il a chez lui une pharmacie préparée par ses soins, et il donne aux malades les médicaments nécessaires et cela gratuitement.

 

Voici le témoignage de l'abbé Lemonnier, curé du Mesnil-Opac nous décrivant la situation du Mesnil-Opac à l'aube de la libération : "devant l'avance ennemie, nous avons essayé de mettre le reliquaire de St Vincent en sécurité. Mme Quesnel a fait creuser dans sa cave une fosse. Malheureusement, l'eau est arrivée en abondance. Ce même jour à midi, M.le Maire de Mesnil-Opac est venu m'annoncer qu'il fallait évacuer à 4 heures le soir. Quoi faire ? La route est continuellement bombardée, c'était s'exposer de transporter la relique. Il y avait des cachettes très sûres dans l'église. C'était le meilleur parti. Nous pensions aux bombardements et non pas à l'incendie. Trois chars allemands sont venus se poster près de l'église, ils ont été la cause du bombardement, avec des bombes incendiaires. Il ne nous restait de l'église qu'une porte, un missel, un calice en argent piétiné qu'il a fallu faire redresser et réargenter." La guerre est finie, et l'église est anéantie avec tous ces précieux trésors qui faisaient la notoriété du Mesnil-Opac.

 

L'église actuelle de Mesnil-Opac est de style moderne puisqu'elle a été entièrement reconstruite en 1957. Cette église est d'une belle simplicité par ses lignes sobres et la rigueur des verrières. La bénédiction des cloches et des vitraux s'est faite la même année avec la présence de son éminence le cardinal Grente qui avait offert son reliquaire de Saint Vincent à la commune en 1930. Le cardinal Grente (fin XIXème-début XXème siècle) venait de passer ses vacances à Mesnil-Opac lorsqu'il était enfant, il apprenait le latin avec son professeur le curé du Mesnil-Opac. Il s'est livré à plusieurs facéties restées célèbres comme celle de Noël, lorsqu'il fit fonctionner sa boîte à musique durant la messe de minuit. Une plaque en sa mémoire lui est attribuée près du calvaire. On observe dans les vitraux les armoiries du Cardinal Grente, afin que son souvenir ne s'efface jamais de la pensée des habitants de Mesnil-Opac. 

On trouve une Sainte Femme couronnée datant du XVIIIème-XIXème siècle, inscrite aux Monuments Historiques.

A gauche de l'autel, on peut admirer la statue de Saint Vincent, en bois polychrome du début du XVIIIème siècle. Il est invoqué comme le protecteur des biens de terre et des animaux domestiques ainsi que pour les maux de la bouche.

 

 

Le Mesnil-Opac est un des endroits où les randonneurs sont heureux de se retrouver en accord avec la nature. René Toustain de Billy trouvait son inspiration pour ses poèmes dans les sentiers du Mesnil-Opac où l'on découvre le bocage tessyais avec ses charmantes collines et ses vertes prairies. 

Mairie (fermée)